dimanche 24 mars 2013

Neverwhere (Mike Carey & Glenn Fabry)

Je dois dire que la couverture me
déçoit. Le regard est pas mal foiré et
Porte semble beaucoup moins clodo
que dans le livre. Normalement elle
est habillée comme une SDF. De ce
côté là c'est un poil raté.
Vous avez bien lu l'article précédent ? Celui-ci découle totalement de l'autre, puisque c'est le même livre, mais à présent dans son adaptation en bande-dessinée dans l'année 2008 (pour la France, mais un ou deux ans avant pour les États-Unis). Du coup ce n'est pas véritablement une simple chronique sur la BD, mais bien un comparatif entre les deux, notamment sur le fond et la forme. Indissociable, mais peut-être aussi complémentaire, qui sait. Vous voulez le savoir ? Alors lisez la critique du livre dans le post précédent. C'est fait ? Alors à présent, voyons la BD tiré du roman de fantasy Neverwhere !


Résumé en trois mots : Londres, Souterrains et Portes

Donc, Neverwhere à été adapté en 2007, la version livre datant de 1996. Dix ans séparent seulement les deux, mais voyons un peu si cette distance n'a pas trop jouée sur la transcription d'un média à l'autre (oui, BD et livre sont deux médias différents).

Premièrement, le dessin. Là je dois dire que j'ai été bluffé. Pourquoi ? Tout simplement parce que le dessinateur à réussi à faire des gueules qui correspondent exactement aux personnages du roman, notamment Croup & Vandemar, ainsi que de me faire noter des détails que je n'avais pas remarqué (la tête du Marquis est très différente de celle que j'avais en tête, mais en fait j'avais mal lu sa description). Chasseur est totalement différente de ma vision mais également très bien, l'ange réussi, en fait tout les autres sont bon. Richard est parfaitement bien fait (je ne sais pas pourquoi, j'avais en tête Ewan McGregor dans Trainspotting ...) et Porte, même si je regrette qu'elle n'ai pas plus l'air de la clodo décrite dans le roman, est très sympathique.

Sinon, le dessin est très bon, assez détaillé, très typé comics, mais pour une fois je n'ai pas été dérangé par lui. C'est une bonne version, avec des petites touches très sympathiques. Je dirais juste que comme d'habitude, les personnages me semblent souvent figés. Pourtant, les dessins sont dynamiques, et les scènes d'actions fluide. Les couleurs sont très bien choisi, même si certains détails paraissent curieusement flashy. Mais dans toutes les pages, ça passe allègrement inaperçu.

Tiens, en parlant du nombre des pages, il faut bien le souligner : l'album est très gros. Il faut au total 192 pages (ce qui explique que le prix d'origine soit 24 € .... Heureusement que j'ai trouvé pour 10 de moins !) et présente le format classique des comics (a savoir, une 25 par 16.6), plus petit que du A4 mais plus gros que les formats de poche ou les petits formats franco-belges. D'ailleurs il est à couverture rigide et à la fin vous avez une compilation des couvertures de chapitres. Ah oui, petite précision : il arrive bien souvent qu'en Europe les éditeurs fassent le choix de regrouper en intégrale plusieurs chapitres de comics au format américain. Par exemple, ici, nous avons en fait 9 chapitres regroupés dans un seul volume (cette pratique marche aussi pour de nombreux Batman, pour Walking Dead ....). Pour chacun de ces chapitres, une couverture est dessinée (spécialité américaine également), qui sont regroupés à la fin pour pouvoir les détailler (elles sont présentes dans le récit, mais avec du texte par dessus). Je dois dire qu'elle sont sublimes, et que c'est un régal à regarder.
Ensuite, passons au gros du texte : le corps en lui même. L'adaptation. Là encore, je dois dire que j'ai été largement bluffé. Je ne pensais pas à une adaptation tellement fidèle. Le récit est totalement repris, de A à Z (bien évidemment, avec quelques coupes qui devaient être faite, mais je vous assure qu'on ne le distingue pas tellement au final). Certains points disparaissent, un ou deux personnages sont passés à la trappe, et quelques petites modifications interviennent de ci de là (comme par exemple lors de la fin, ou il n'y a pas le coup du vin d'Atlantide, ce qui est dommage en un sens) mais tout est respecté au final.
Une couverture (la dernière)
d'un magazine américain
Enfin, presque tout. Je suis outré pour un point. Un énorme, un gros comme une maison qui est passé à la trappe : la fin ! Ils ont zappé toute la réflexion sur la valeur de notre monde et d'un monde de fantasy. Ayant tellement adoré cette fin, je ne peux que être outré de ne pas l'avoir retranscrite. Mais en même temps, je pense franchement qu'elle était dure à remettre. Par contre j'ai trouvé grandement dommage qu'on perde tout le côté métaphore des clodos et du monde de la misère, ce qui est vraiment regrettable. Cela dit, tout le récit était déjà dur à mettre en place, cette subtilité était peut-être superflue. Ce côté est surtout absent lors de l'épreuve que passe Richard, qui insiste uniquement sur le fait qu'il se croit dément, et pas plus. Là par contre, les choix sont nettement plus judicieux, notamment pour faire avancer la BD avec le même rythme tout au long.
Du coup, je trouve les coupures très bien faites, et qui n'empêchent pas le récit de sombrer dans la pale copie d'une œuvre remarquable. Le récit reste très bon, rythmé, et avec son lot de surprise et d'amusement. Elle est un poil plus sobre que la version littéraire, notamment au niveau des métaphores, mais je pense qu'elle se rattrape largement par son côté plus marqué fantasy. Une belle réussite d'adaptation.

En résumé, c'est une œuvre qui à mon avis totalement réussie. Elle parvient à éviter l'écueil de l'adaptation ratée, reste très fidèle à l'univers d'origine et pose un excellent graphisme, notamment au niveau des personnages. Par contre, on peut regretter une profondeur moindre au niveau du scénario. Je dois dire que ceci est à mon avis le plus gros défaut qu'on peut noter. Pour le reste, la qualité est largement au rendez-vous, et les 190 pages s'enfilent à une vitesse remarquable. On est captivé une nouvelle fois dans ce Londres d'en bas, avec un fil directeur simple mais tellement efficace. Et lorsqu'on referme le livre, c'est avec une petite pointe de déplaisir en sachant que se finit là notre découverte du monde d'en bas et de ses codes. Il ne nous reste plus qu'a regarder tranquillement autour de nous, d'imaginer peut-être ce que serait le reflet déformé de notre monde, de contempler notre vie avec un regard différent, et surtout de se demander si on ne va pas aller très vite en libraire, genre dans l'instant, dévaliser le rayon fantasy, s'enfermer pendant six mois et se gaver jusqu'à la lie. Je crois bien que la dernière option me plait beaucoup.

(Chronique n°31)

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