dimanche 26 mai 2013

Soie (Alessandro Baricco)

Il y a des livres, leurs lectures relève d'un incroyable concours de circonstances. Je dois dire que celui-ci est un exemple type du genre. Je dois avouer que je n'en avais jamais entendu parler avec le challenge "Roman culte", et qu'il ne m'évoquait absolument rien. Cependant le titre semblait sympathique, et je me suis dit "pourquoi pas ?". En regardant un peu sur le net, je me suis rendu compte que ce livre était très court et en plus vendu en occasion à des prix défiants toutes concurrence via le site Amazon. J'ai sauté dessus sans trop me poser de questions. Après tout, n'est-ce pas un roman que l'on qualifie de culte
 Je l'ai acheté et ajouté à ma table de chevet. Sur la grosse pile qui ne cesse jamais d'enfler, tel un tonneau des Danaïdes inversé. Ma mère me l'avait emprunté pour le lire rapidement et m'avait dit qu'il n'était pas extraordinaire. Je l'ai réservé du coup en lisant tranquillement d'autres choses. Finalement, je viens de finir aujourd'hui Dracula de Bram Stocker, avec un petit gout d'amertume en bouche par rapport à ce qui était si souvent vantée. Du coup, je me suis rabattu la-dessus, me disant qu'au pire il serait de toute façon court. Une demi-heure plus tard je l'avais fini et je m'installais à ma chaise de bureau pour faire cette chronique. Je suppose qu'en voyant la colonne de droite vous avez déjà compris. Mais je le fais tout de même.


Résumé en trois mots : Japon, Voyage et Amour

Je dois bien dire une chose, c'est que pour bien lire un texte il faut se mettre en condition. Et lorsqu'on est en train de lire il faut avoir le choix de la bonne musique. A force je commence à connaitre certaines pistes : pour de la science-fiction, Vangelis passera sans souci. La fantasy avec Marillion, le fantastique avec Pink Floyd, Mike Oldfield quand on ne sait pas trop quoi mettre d'autres, et pour l'horreur, les bandes originales sont le mieux ! Le classique se coule partout, c'est selon ce qu'on lit. Éviter les chansons en langues qu'on comprend. Et surtout, privilégier un timbre de voix en adéquation avec le propos.
Si je vous dis ça, c'est parce que je pense franchement que Sarah Brightman passe parfaitement avec ce livre, sans doute un des éléments qui m'a fait aimer le livre aussi fortement. En tout cas le mariage est plus que délicieux.

Ce livre est assez impressionnant à lire. Je ne savais pas le moins du monde à quoi m'attendre en ouvrant les 140 pages de ce que j'appelle un "livre minuscule". Et puis je me suis plongé dedans, avec ces 65 chapitres qui découpent le récit et l'accélèrent encore un peu plus. On progresse très vite dans le récit et la narration accélère encore ce propos. L'ensemble est lu à une vitesse incroyable, et pourtant le voyage va sembler lent et tranquille, à l'opposé de ce que donnera le même usage dans un Running Man de Stephen King. La forme est assez proche, mais le fond non.

Ce roman à une sonorité particulière. Je sais que cela parait totalement absurde de parler de fond sonore lorsqu'on lit, mais dans ce genre de récit on se rend compte qu'il existe. Et c'est très personnel. Chez un Stephen King, c'est l'auteur qui nous raconte tout avec sa voix off. Il commente, dissèque, expose tout sans concession. Gaiman aussi à une voix off, mais interne au récit, la voix d'une personne qui suit le personnage principal, pas l'auteur tout puissant. Il fait plus de mystères. Dans un Bernard Werber, le ton est carré, posé par les personnages et leur points de vues.
Ce que je veux dire, c'est que selon la voix, le lecteur "entend" plus ou moins de choses. Dans un Werber, les personnages parlent tout le temps, dans leur tête ou en vrai. C'est bruyant. Un Stephen King sait être calme, mais du silence qui précède la tempête. Dans un Gaiman, la voix off semble être un narrateur lisant un texte, comme la voix off d'une radio.
Dans Soie, la voix off est tue. C'est silencieux, c'est calme. Les gens parlent peu. C'est dû à plusieurs choses : la mise en forme, sans un seul guillemet ou ligne blanche entre les dialogues, les nombreux retours à la ligne, la mise en place des termes ... Chacun de ces éléments participe dans le tout à la mise en place d'une ambiance. Et je pense que cette ambiance est primordiale dans un livre. L'auteur à su parfaitement faire dans ce roman-ci.

La narration est externe mais suit un personnage. Hervé Joncour, un homme qui va chercher durant quatre voyages des vers à soie au Japon, les seuls à ne pas être contaminés par des maladies, et qui permettent de faire tourner les soieries de Lavilledieu. Quatre voyages durant lesquels il découvrira plusieurs choses.
Je ne peux pas vraiment en dire plus, il faut lire car ce roman est avant tout une façon d'écrire, une écriture qui nous prend et ne nous lâche que lorsque le livre est fini. Je ne l'aurais posé avant la fin pour rien au monde (pas même ma vessie). Le ton nous entraine sans que l'on puisse arrêter ne serait-ce qu'un seul instant. Lorsqu’on a fini, on pose doucement le livre et alors seulement on reprend pied avec la réalité. Enfin, reprendre pied ... On reste dans l'univers du livre, dans ce monde qui nous a entrainé et ensorcelé. Ce n'est pas seulement prenant, c'est beau. Beau comme un rêve dont on se rappelle.

Beaucoup de choses ne sont pas dites dans le livre, et je crois que c'est un atout majeur. La libre place à l'imagination, à la rêverie, à notre propre cerveau. L'auteur n'impose rien, ne dit rien clairement. A nous de deviner, à comprendre ce que l'auteur souhaite dire, à ce que le personnage pense et ressent. Rien ne sera très clair, mais on comprend toujours intérieurement, et c'est le plus important. Sans qu'on puisse le réexpliquer, il suffira de le faire lire à quelqu'un d'autre pour qu'il comprenne. C'est ce que ce livre à d'unique, il est difficile d'expliquer ce qui est bien dedans. Il faut le lire pour comprendre.

Ce que j'aurais retenu de ce livre, c'est qu'il est beau. Fabuleusement beau. J'ai vraiment adoré, plongé dedans avec délice, je suis resté en apnée durant tout le voyage qui nous fait valdinguer complètement, et puis on ressort, trempé, essoufflé, mais heureux de ce qu'on a vu. C'est sublime comme voyage et j'en redemanderais.
Si le récit semble un peu court, je dirais qu'il est juste parfait, gardant toute sa force. Rien ne vient troubler l'histoire, le récit gardant juste l'excellent. Et la construction est parfaite, usant de répétitions fréquemment, donnant un même mouvement à l'ensemble. C'est presque une mélopée qui nous berce doucement tandis que le voyage continue. Je pense qu'en train, ce récit doit être extrèmement bon.


Pour résume avant que je n'étale pendant deux heures mes impressions sur ce livre, je dirais simplement que j'ai adoré. Je pense que vous l'avez bien compris en lisant le paragraphe précédent, mais je suis vraiment tombé sous le charme de ce livre qui m'était complètement inconnu il y a si peu de temps encore. Une histoire simple et belle, touchante, qui nous ensorcelle et m'a fait vibrer pendant toute la lecture, j'en redemande. Le rythme, la construction, la narration, tout y est (et je salue bien bas la traduction qui a du se donner un mal de chien pour traduire l'ensemble du livre). Bref, tout est parfait dans ce roman je crois. Du début à la fin, j'ai adoré. Il va rentrer en ligne direct dans ma bibliothèque d'immanquable.
Et je finirais simplement par un grand MERCI à Métaphore et à son challenge, sans lequel je n'aurais sans doute jamais lu ce livre.

(Chronique n°48)


Encore une participation. La quatrième

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