samedi 29 juin 2013

L'homme qui rétrécit (Richard Mathesson)

J'aime bien certains auteurs, qui utilisent des thèmes simple pour développer leurs histoires, et qui en tirent des choses grandioses, avec des réflexions sur un peu tout ce qu'on peut imaginer, mais qui en tirent surtout. Je veux dire par là que lorsqu'on referme le livre, on se pose plus de questions qu'au début de la lecture, on est avec le cerveau qui travaille (ce qui lui est très profitable), et c'est après d'autant plus enrichissant dans des discussions avec des personnes qui l'ont lu également. C'est le genre que j'aime beaucoup, et dans lequel il faut bien reconnaitre que les romans fantastique et de science-fiction sont les plus intelligent. N'en déplaise aux autres. Et c'est dans ce genre de catégorie que je classe le présent ouvrage.


Résumé en trois mots : taille, peur et réflexion


L'auteur, Richard Matheson, nous habitue à quelques petites choses communes dans ses livres, bien que je n'en ai connu que deux, mais c'est très net. Déjà autour de la sexualité du personnage qui est encore une fois présentée sous un angle curieux et que j'ai trouvé assez dérangeant. Mais bon, c'est peut-être dû au contexte de l'écriture. Sinon, le rapport avec sa femme est assez proche de l'idée développée dans Je suis une légende, même si le contexte est très clairement différent. Par contre j'ai retrouvé également l'approche scientifique de la chose, avec des développements qu'on n'attend pas forcément (notamment autour des avantages que l'on peut trouver à être de petite taille).

Le postulat du roman laisse l'idée pour beaucoup de choses, mais ici l'ensemble du récit (ou presque) se déroule dans un cadre intime et explore tout les territoires de l'âme du personnage. En attaquant le physique du personnage, Matheson explore son psychique, allant du handicap que peut représenter le fait d'être petit dans différentes occasions, comme le cas d'une bête de foire, mais également dans ses rapports avec sa fille, et surtout avec sa femme, qu'il ne peut plus aimer avec sa taille, qu'il ne peut pas aider. C'est assez remarquable comme tournure, et l'orientation exclusive sur le personnage nous fait rentrer d'autant plus dans sa peau, avec toutes les émotions qui nous traversent également du coup.

Mais le livre parle aussi de la survie désespérée d'un homme, qui sait qu'il disparaitra un jour de la surface de la Terre en diminuant de taille, et qui lutte encore pour survivre dans sa cave, enfermé, cherchant nourriture et eau tout les jours, dans un monde qui lui est désormais hostile sous toutes ses formes. Les métaphores peuvent être prises un peu comme on le souhaite dans ce livre qui est très différent selon l'interprétation (chacun la sienne en gros). Mais j'ai le sentiment que l'araignée, c'est la peur face à la mort, qui est toujours là, tapie quelque part, et qu'il nous faut tuer pour espérer sortir enfin à la lumière. Enfin, ce n'est que mon avis.

Il faut ajouter en sus à tout ça une lecture très fluide, avec un suspense qui s'installe et des passages de toute beauté également. Les émotions et la tension se mélangent, comme un bon film d'action, et l'ensemble est juste excellemment dosé. Ça se lit et se dévore en un rien de temps, et le livre laisse une excellente impression.


Ce livre confirme à mon sens le caractère excellent de Matheson et son statut de pilier des écrivains fantastique. Sans atteindre encore les plus haut sommets, nous avons le droit à un excellent livre, qui nous fait réfléchir, avec un personnage attachant, qui va nous faire entrainer dans une histoire prenante, mais nous embarque en plus dans une réflexion qui n'est pas du tout dénudée d'intérêt. Le tout se dévore à belle dents, et les niveaux de lectures s'emboitent parfaitement.
Sans dire qu'il soit meilleur ou moins bien que Je suis une légende, il est d'une excellente facture, c'est certain. A mon avis les deux livres sont complémentaires dans leurs genres, et posent pas mal de questions sur la nature même d'un homme, chacun apportant un point de vue et les deux se complétant très bien. Tout le monde peut se poser des questions sur ce sujet, et tout le monde peut trouver ici des éléments de réponse.

(Chronique n°56)

jeudi 27 juin 2013

Le grand secret (René Barjavel)

Je ne sais pas s'il vous est déjà arrivé de pleurer à la lecture d'un livre en particulier. Moi oui, souvent. Et, je remarque, il s'agit souvent alors d'une histoire d'amour. J'aime les histoires d'amour, lorsqu'elle sont belles et bien faites. Le film Eternal Sunshine of the Spotless Mind est dans mon top de film préféré, car il propose une histoire d'amour, mais intelligente. Rien ne m'agace plus qu'une histoire d'amour bâclé, quelque soit le support. C'est jamais simple dans la vie, faut pas nous faire croire en fiction que c'est toujours pareil. Et puis l'amour c'est pas simple du début à la fin. C'est pas plat, c'est des montagnes russes d'émotions. Et quand quelqu'un arrive à le faire ressortir, alors je suis sous le charme.
C'est un de ces livres là dont je vais vous parler aujourd'hui. Un livre d'un auteur qui sait en parler d'une si belle façon. René Barjavel, un écrivain qui m'est cher, dans son livre Le grand secret.
Précision : la première partie date de hier soir, où j'ai dû écrire un petit moment, et la fin d'aujourd'hui (hier pour vous, je poste ce message mercredi seulement). Désolé du commentaire décousu, mais quand on est à fond dedans, il est difficile d'écrire normalement ...

Résumé en trois mots : Amour, Tragédie et Monde
 
Parfois, lorsque je lis un livre,il me vient une sensation. Une sensation étrange, qui monte en moi et me met souvent le cœur au bord des lèvres. Le roman m'a happé, il m'entraine dans une histoire qui me tient en haleine, mais ce n'est pas tout. Dans le cas d'un auteur du genre de Barjavel, il y a quelque chose en plus. J'avais lu jadis La nuit des temps, que je dois relire impérativement afin de me rappeler cette si belle et si terrible histoire, ou j'ai aussi dévoré Ravages ainsi que L'enchanteur. Cette fois-ci, ce fut Le grand secret. A la lecture des 70 premières pages, j'ai dû m'arrêter pour mettre par écrit de début de chronique que je pense compléter dans ma lecture. Une chronique au ton particulier je pense.

L'auteur m'a toujours touché par un côté humain incroyable dans tout ses romans, mais aussi par autre chose. Barjavel, c'est à mon humble avis l'auteur qui sait le mieux écrire sur l'Amour. Un sujet intemporel, mainte fois repris, il parait qu'il toucherait tout le monde. Et moi j'y suis sensible, tout particulièrement. Pour autant un roman à l'eau de rose m'énervera, mais je n'ai pas honte de déclarer que je pleurais à la fin de Paul et Virginie. Barjavel, c'est un auteur qui a su, dans chaque roman que j'ai lu (et tout particulièrement La nuit des temps) trouver les mots qu'il fallait pour mettre en lumière l'amour. Le vrai, l'authentique. Celui qui ne se contente pas de compromis, celui qui prend et ravage le corps et l'esprit. Celui qui vous ensorcelle et vous transporte jusqu'au bout du monde.

Ma lecture fut sans doute biaisée par la musique, du Loreena McKennitt chantant Greensleeves n'aide pas à se mettre en atmosphère rieuse, mais je dois bien dire que le simple fait de lire, l'ordre des mots, la composition des phrases, le sens derrière, tout m'a entrainé dans un tourbillon sensorielle dont j'ai eu le plus grand mal à m'en détacher avant d'atteindre le seuil de rupture et de rester éveillé toute la nuit. Car ce roman m'a fait pleurer en 70 pages. Je dois dire que je ne pensais pas la chose possible. Il m'a tellement ému que j'ai du cesser de lire avant de craquer. Je dois prendre un peu mon souffle avant de pouvoir poursuivre et me laisse embarquer pour la suite de l'histoire. L'écriture est trop dense pour une lecture en un bloc, elle m'aurait trop fait souffrir, trop de choses auraient remuées si je l'avais fait. Il fallait d'abord que je couche des mots pour essayer de faire comprendre ce que je ressentais, avant de pouvoir seulement espérer continuer. Il fallait que je me soulage l'esprit avant de repartir. Et je vais y retourner, m'attendant au pire comme au meilleur. Connaissant Barjavel, il jouera avec mes émotions et me laissera haletant et pantois tandis que je devrais digérer quelque chose qui a un impact des plus conséquent sur moi. Les belles histoires d'amour, ce n'est pas facile à écrire. Et Barjavel m'a donné les meilleurs, tout porte à croire que celle-ci sera encore au niveau.


Maintenant qu'une journée à passée, je pense qu'entre autre la musique n'a pas aidée. Mais bon ....
La suite est différente de la première partie, avec des passages à nouveau cruels, comme ceux de La nuit des temps, des idées en vrac autour d'un thème (que je ne dévoilerais pas au risque de vous gâcher la première partie du roman),  et même des petites doses d'humour. Mais surtout, une belle réflexion sur plusieurs choses, et aussi sur l'amour. L'amour à la Barjavel, c'est quelque chose. Je peux vous le garantir. En tout cas ça me touche beaucoup.

A cela, j'ajouterai des "classiques" qu'il faut noter : un style d'écriture parfait, qui donne envie de tourner les pages sans s'arrêter, des personnages qui sonnent justes, aux actions parfois imprévues, mais qui sont attachants, des situations qui s'emboitent, une petite touche d'humour qui rehausse le gout de l'ensemble et rend la sauce prenante, bref l'ensemble est d'excellente facture.

Avec tout cela je n'ai même pas parlé de l'histoire. C'est assez difficile d'en parler sans dévoiler l'intrigue. C'est l'histoire d'un homme et d'une femme qui s'aiment, mariés. Chacun de son côté. Et puis d'un secret très lourd à porter qui relie les chefs de plus grands états du monde et qui est parti d'Inde. Un secret qui vaut très cher, qui concerne tout le monde, et qui pèse lourd. Très lourd, car il fait intervenir des choses que l'on ne soupçonne pas au premier abord. Je sais, le résumé est succin, mais en le lisant vous comprendrez mieux. Il est difficile de décrire l'attachement entre les deux personnages, la façon dont les choses s'imbriquent avec les évènements historiques, et beaucoup d'autres détails. Et j'avoue que j'ai du mal à synthétiser le tout, la lecture est tellement fraiche.


En fait c'est assez dur  de parler d'un roman qu'on vient de dévorer en deux jours, qu'on a adoré et qui nous a fait pleurer à sa lecture. J'ai aimé, c'est indéniable, et je trouve vraiment que Barjavel à un style et une prose sublime, qui restent gravés dans ma mémoire et me remuent profondément, mais c'est difficile d'en parler vraiment.
Bref, je pense vraiment que c'est un livre génial à lire. C'est du très bon Barjavel, dans la veine directe de La nuit des temps (qui reste meilleur selon moi). Et c'est beau ... C'est de l'excellente science-fiction à la française. J'en veux encore ....

(Chronique n°55)

lundi 24 juin 2013

Les 40ème délirants (Raymond Devos)

Une chose assez courante en littérature, c'est la catégorisation d'un livre dans un style bien défini et que l'on cherche à distinguer du reste. Ce qui souvent absurde, car un livre reste avant tout un message, comme n'importe quelle expression artistique. On veut dire quelque chose, on le dit via un moyen qui parlera plus que la simple parole normale. On peut broder des textes, ou les simplifier, écrire,  chanter, jouer, peindre, sculpter, bâtir ...
Et parfois, on ne sait pas trop dans quelle catégorie il faut ranger ce que l'on a à dire. Alors c'est le moment du mélange de plusieurs choses. On mélange des styles, des effets, des arts, et le final est alors plus déroutant que l'on pourrait croire. C'est, mesdames et messieurs, un roman de ce genre que je vous propose aujourd'hui, rapidement. Un beau roman. Les 40ème délirants de Devos.


Résumé en trois mots : Absurde, Poétique et Jeux de mots

Devos, je pense que c'est mon comique préféré. Il sait manier à merveille le mot et le verbe, accommoder la langue, l'humour, la poésie et la grande tradition du mime, du clown et simplement de la musique. Ses spectacles sont un régals car un peu fourre-tout, sans que l'on puisse deviner la suite, sans que l'on sache ce qu'il va encore trouver pour nous émerveiller. Je suis toujours plié de rire à chacun de ses sketchs, et je suis aussi émerveillé, étonné, sidéré, fasciné par cet homme qui sait combiner tant de talents dans divers domaines au même moment au même endroit pour juste nous faire rire, sourire, ou simplement passer un moment agréable. Je crois que dans le genre, il excelle. Il prenait plaisir à faire rire son public, et cela se ressent. Un artiste que j'adore.

Quand je vois un livre d'un homme génial et qui sait marier les mots, je ne réfléchis pas trop longtemps et je me jette dessus. Lorsqu'on me dit que Devos à écrit des livres (j'ai découvert cela très récemment), je me jette dessus sans le moindre temps de réflexion. Et me voila possesseur d'un petit livre en format de poche, au titre rêveur, à la couverture qui attire l'oeil et me donne envie de le lire. Que me faut-il de plus pour ouvrir ? Je me précipite dessus et le dévore en moins de une heure. Encore dans le livre, je m'assois pour écrire cette chronique.

Ce livre est très court. Mais d'une certaine façon, il est très lent. L'histoire est tellement absurde de base. Un homme, mime-parlant, est entrainé par un autre homme pour aller dans les contrées de l'imaginaire. Ce mime, appelé Max, va rentrer dans un désert par son imagination, mais se retrouve coincé lorsqu'une tempête se déclenche. Et le voila prisonnier d'un monde au-delà de l'imaginaire ! Coincé sur une île, peuplée de fous, ou de personnes ayant dépassés les limites de l'imagination, et qui vont essayer de retourner dans le monde réel.

Ce spitch peut laisser songeur, mais il est un prétexte à une successions de petits chapitres qui vont découper le livre en autant de petits sketchs, chacun à sa manière amusant. Ils sont tous originaux, ils sont tous drôles, chacun à au moins un jeu de mots et tous ont du rêve, de la poésie et de l'imagination à revendre. En un roman, Devos nous livre assez d'idées pour faire deux milles romans. Dans le genre, il me rappelle fortement Boris Vian et son univers décalé. Sauf que Boris Vian faisait une satyre de la société, alors que Devos s'évade dans des contrées complètement lointaines, sans plus aucun liens avec la terre (alors qu'elle s'en attache à chaque paragraphe), dans un monde où l'imaginaire lui-même est dépassé. Nous voila dans une île, près du 40ème délirant, proche du 40ème rugissant. Avec des fous.

Si j'ai adoré ce roman (et je l'ai vraiment adoré), c'est pour son style. La patte de Devos se ressent très fortement, au point qu'on pourrait l'entendre nous le lire. Je suis sur qu'en lecture orale, ce livre aurait un succès incroyable. Il est drôle d'un bout à l'autre, inventif, sans perdre pour autant une structure narrative, il contient des milliers d'idées qui bouillonnent en tout sens sans jamais se perdre ni s'arrêter, il vous fait passer par tout ce qu'on peut imaginer. Et voila que nous avons aussi le droit à des grands personnages, un air de Duke Ellington et bien d'autres choses qui nous font voyager agréablement. Ce roman pose une ambiance qu'on ne lâche plus et dans laquelle toutes les folies sont permises. Ne cherchons pas à comprendre, allons de l'avant simplement. Et sans attaches ! L'introduction est en ce sens parlante. Je vais la mettre ensuite.


Devos signe un superbe livre, totalement en accord avec ce qu'on connait de lui sur scène. Il nous livre un ouvrage décalé, sans que l'on puisse le catégoriser dans un genre précis. C'est drôle, c'est frais, c'est neuf, c'est décalé, c'est inventif. Je pourrais le couvrir d'éloge des heures durant. C'est court et vite lu, c'est très facile à relire, on retrouvera beaucoup de détails qui nous ont échappés lors de la première lecture. Les perles sont légions, tout est bon. Je suis charmé, au-delà de ce que je pensais. A lire ? Oui, si vous aimez Devos. Sinon, passez votre chemin, imperméable à ce style unique au monde. Il nous faut aimer la belle langue, la fantaisie d'esprit et l'imagination. C'est du Boris Vian sans critique sociale mais avec encore plus d'humour et de bon mots. J'aime les deux. J'ai aimé Devos. Je vous le recommande.

(Chronique n°54)


Lisez-moi cette introduction :


Au-delà de l'imaginaire

Ceci n'est pas un roman.
C'est un récit .... rocambolesque.
Le récit d'un voyage dans l'imaginaire,
c'est-à-dire qui ne répond pas aux lois du réel.
Pas d'horaires .... ni d'avance, ni de retard !
On part quand on veut.
On ne revient pas à l'heure dite.
Personne ne vous attend au pied
de la grande horloge.
Aucun décalage horaire.
Aucun train ne vous siffle.
L'esprit suit son chemin, vagabonde ...
sans carte ni boussole,
ce qui n'empêche (n'exclut)
ni les sentiments, ni les drames ...
ni ... d'en rire ...
si l'envie vous en prend.

                                 Max.

jeudi 20 juin 2013

Demain les chiens (Clifford D. Simak)

Encore une petite lecture d'un ouvrage de science-fiction à l'ancienne. Cette fois-ci aussi, j'ai découvert ce livre dans les bouquinistes d'occasions de la place Kleber (tout comme Des fleurs pour Algernon), sauf que celui-ci à des pages qui se détachent, et j'ai un peu plus de mal avec les vieux livres de science-fiction, dont la finition des éditions est souvent dégueulasse. Cela dit, l'avantage c'est de pouvoir lire un livre culte pour moins de deux euros. Parce que oui, ce livre est un livre culte, et je dirais même un sacré immanquable de lecture.
En fait, c'est plus de la philosophie que de la science-fiction que nous avons là, mais toujours bien distillé dans une histoire qui va nous entrainer un peu partout dans le système solaire pour comprendre comment les chiens ont remplacés l'humanité ! En avant pour Demain les chiens de Simak !



Résumé en trois mots : Chiens, Légendes et Humanité

Le roman est en fait une suite de nouvelles de l'auteur qu'il a aggloméré dans un seul récit, avec en supplément des notes prises au début de chaque nouvelles. Le livre a cependant une cohérence narrative tout au long, avec des personnages qui reviennent, une famille qui est suivi sur plusieurs années (en fait plusieurs millénaires d'ailleurs), et aussi plusieurs principes qui sont repris tout au long des nouvelles. Le tout avec un fond résolument philosophique, bien évidemment.

L'histoire serait dur à résumer, et je dirais juste qu'a travers huit contes nous allons découvrir comment l'humanité à disparue, remplacée par les chiens et comment les hommes sont devenus progressivement une légende, au point que les canidés remettent en cause l'existence même de ces personnes qu'ils considèrent comme des Dieux.

Les nouvelles vont commencer dans un futur très proche, où l'utilisation du nucléaire à changé toute la vie des personnes, tandis que les gens se sont dispersés dans le monde sans plus utiliser les villes (appelées "cités", un concept que les chiens ne comprennent pas), et le tout se finit dans une nouvelle où l'humain à totalement disparu de la surface de la Terre. Remarquez, la fin est ambiguë sur le fait que l'on soit encore sur Terre, mais je vous laisse lire pour apprécier le sujet. En tout cas il est très bien traité.

Le livre est assez bien écrit, puisqu'il mélange les contes avec des notes d'une édition fictive par les chiens, expliquant les doctrines vis-à-vis des contes, ceux pour et ceux contre l'existence des hommes, des clés de décryptage selon les chiens (une bonne partie semblant totalement fausse), et autres petits amusement dans ce genre. C'est assez amusant de lire l'ensemble des théories alors que l'on comprend ce qui s'est réellement passé, et que l'on sait aussi la vérité quant au monde dans lequel évoluent les humains.

En fait, le récit est truffée de réflexion philosophiques qui partent un peu dans tout les sens, autour de l'évolution humaine, autant sur le plan philosophique que technique (ah, les vieux récits dans lesquels on croit encore à la puissance de l'atome ... C'était avant Fukushima et Tchernobyl ça), ainsi que sur les mutations d'un être humain, les rapports sociaux entre les différents membres d'une communauté urbaine, mais aussi le simple fait de la communauté humaine. L'auteur glisse aussi des remarques sur l'être humain, tour à tour critique ou élogieux, à la fois sur les façons dont l'homme se conduit, envers un peu tout, mais aussi sur sa capacité à s'adapter, sa puissance, mais évidemment sur sa cruauté aussi (alors même que le meurtre disparait au fur et à mesure du récit). Le tout comporte aussi des commentaire sur la robotique, avec notamment Jenkins, incarnation de l'esprit mécanique, de la nouvelle forme de machine. Il est d'ailleurs un héros très intéressant, puisque d'une nature qui lui permet d'être présent dans environ toutes les nouvelles, et qui va avoir un rôle bien changeant au fur et à mesure des récits.
Enfin, j'ai noté (mais c'est mon interprétation) une réflexion sur Dieu et la divinisation, en posant l'homme comme une sorte de Dieu d'un nouveau monde, et toute la réflexion qui va autour. Après j'extrapole peut-être mais j'ai eu l'impression que l'auteur en profite pour glisser des allusions là-dessus, qui ne sont d'ailleurs pas pour me déplaire. Mais je ne développerais pas, vous laissant le choix de le comprendre comme vous le voulez.

Dans l'ensemble du récit, l'auteur pose véritablement son point de vue, mais celui-ci part dans tout les sens, et le rajout des notes par les chiens rajoute une autre dimension à la lecture, nous obligeant à ne pas que le lire d'un point de vue d'humain du XXIème siècle, mais à imaginer celui d'un chien dans douze mille ans, lorsque l'homme n'est plus qu'un personnage de légende. Personnellement j'ai trouvé le ton du récit assez prenant, avec cette double lecture (voir triple) qui s'interroge sur beaucoup de chose et qui part un peu dans tout les sens. Cependant tout l'intérêt est que l'auteur ne nous égare pas, car il ne cherche pas à donner des réponses mais uniquement à poser des questions. Du coup, la lecture est très prenante.

Au chapitre des défauts, j'en relèverais surtout l'un, qui est que certaines nouvelles sont moins intéressantes que d'autres, mais dans l'ensemble elles sont toutes de très bonnes factures. L'autre défaut, c'est un ton parfois ancien dans certains principes ou certains côté très centré sur les Etats-Unis (bien que l'on fasse aussi un saut à Genève). Le coup de la révolution atomique est palpable, mais aujourd'hui Fukushima et Tchernobyl ont remis en compte beaucoup de choses. On peut aussi parler de la vie extra-terrestre, du contact avec les martiens, et puis d'une relation assez curieuses entre personnages, un peu vieillotte. D'ailleurs il faut noter une absence totale des femmes du récit (elles sont à peine évoquée), mais l'ensemble n'aurait pas tellement changé avec un ajout féminin je pense. Enfin, on ne réécrira pas le récit.

Dans l'ensemble, le récit est vraiment très bien écrit et je dois dire qu'il dégage, outre un indéniable côté philosophique, une certaine poésie dans son style. Le fond est très intéressant, avec un auteur qui interroge sur l'homme en thème central, mais qui va partir dans tout les sens autour de lui pour finalement aboutir à une conclusion remplie de questions et sans donner une seule réponse.
L'ensemble du livre se lit très bien, sans aucun temps mort, alors que nous suivons l'humanité dans une déchéance assez curieuse et qu'il ne me semble pas avoir souvent retrouvé ensuite, où le mal est la séparation physique entre individus et le développement de nouveautés, philosophiques, mutantes et robotiques. Une science-fiction très curieuse et que j'ai rarement lu, mais qui est tout autant intéressante. En tant que tel, le roman sent un peu l'ancien, mais il aborde des thèmes d'une belle façon. Un genre que j'aimerai bien creuser si il existe des nouveautés un peu plus récentes. J'en reprendrai bien une petite part.

(Chronique n°53)

dimanche 16 juin 2013

Des fleurs pour Algernon (Daniel Keyes)

Encore une lecture que j'ai faite surtout dans le cadre des challenges. J'ai d'ailleurs noté que je n'ai pas du tout avancé dans celui sur Stephen King, mais j'ai tenté avec le recueil de nouvelles Juste avant le crépuscule, et non seulement j'ai eu du mal à accrocher, mais en plus j'ai une édition ratée. Il manque environ quarante pages qui sont en faites imprimés deux fois. C'est très pénible à lire. Mais j'en ai d'autre, et promis, je vais m'y mettre bientôt, parce que là je ne poste pour l'instant que des anciens ouvrages de lui, ceux que j'avais déjà lu et que j'ai aimé.
Sinon je dois dire que cet ouvrage j'ai eu la chance de le découvrir d'une façon toute bête : les stands de livres d'occasions à Strasbourg. Il y en a sur la place Kléber durant l'été, et j'ai eu la chance d'y trouver plusieurs livres intéressant (Demain les chiens, Des fleurs pour Algérnon, Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur) et qui rentraient dans le cadre du challenge. A moins de deux euros la pièce, on se rue dessus. Et c'est comme ça que j'ai acquis ce petit ouvrage, très court et très dense, qui m'avait attiré l'oeil à la fois par son statut et le bouche à oreille autour de lui, mais également avec son résumé qui sentait bon la science-fiction un peu vieille, celle qui se servait de la nouveauté technologique pour réfléchir sur l'homme et tout ses aspects, moraux, sociaux, intellectuels, ses rapports au reste du monde (nature, animaux, ciel ...). Bref, je me suis réjoui de le trouver et je l'ai attaqué sitôt fini De bons présages.
Et là, je l'ai lu en une journée (un peu plus, je l'avais commencé la veille au soir mais je n'avais pu lire que dix pages). Alors maintenant, voici la chronique !



Résumé en trois mots : Intelligence, Humanité et Souris

Le livre est en fait un journal intime, écrit par le héros, Charlie Gordon, qui est un homme simplet. Il est gentil, travail dans une boulangerie, mais il n'est vraiment pas malin, et vit sa petite vie normalement sans rien demander à personne. Tout bascule lorsqu'il commence un journal intime, en fait le livre, qui va permettre de comprendre une expérience. Une expérience dont Charlie est le centre d'intérêt. Il va subir une opération chirurgicale dans son cerveau pour le rendre intelligent. Les scientifiques ont en fait découverts la molécule du cerveau qui bloquait ses capacités et l'empêchait de réfléchir normalement. L'opération a déjà été tentée sur une souris auparavant. Elle s'appelle Algernon. Une souris de laboratoire classique qui est subitement devenue plus intelligente, de manière exponentielle.
Il vont opérer Charlie, et le voila qu'il va devenir jour après jour plus intelligent. Le temps aidant, Charlie développe des capacités hors-norme. Il est toujours suivi, outre par l'équipe médicale, mais aussi des psychiatre et toute une clinique derrière. Le docteur Strauss, le professeur Nemur, mais aussi son éducatrice pour personne retardée, Alice Kinnan. Tout ce monde va graviter autour de l'expérience du siècle.

Bien évidemment, la découverte de l'intelligence ne va pas se faire sans heurt. Et Charlie, en s'éveillant, va se rendre compte progressivement de ce qui se passe autour de lui. En effet, il va prendre conscience de la façon dont on le traitait en tant qu'idiot, de la façon dont l'intelligence peut le métamorphoser, lorsqu'une idylle va naitre avec Alice, mais aussi lorsqu'il se rendra compte de son passé, de ses anciennes lacunes, et encore plus grave : du fait que l'intelligence ne résume pas l'être humain.

Et bien vite, l'expérience tourne au cauchemar. Algernon commence à décliner, elle perd de ses facultés. Bientôt la voila redevenue aussi simplette qu'au départ. Et pour Charlie commence la descente en enfer, comprenant que son intelligence n'est que temporaire. Et qu'il faudra retourner à son ancien état.


Le résumé que je vous ai fait couvre une large partie de l'ouvrage, mais il faut souligner que non seulement le récit que je vous ai mis est copié au dos en tant que résumé (je déteste les résumés qui vous racontent 90 % de l’œuvre) et de toute façon, ce n'est pas le plus important. En fait, ce qui importe dans le récit, c'est tout ce qu'il y a derrière l’œuvre. A la fois la réflexion qui est menée sur Charlie, son passé et les impacts dans le présent, mais aussi les rapports entre lui et les médecins, la découverte de la sexualité, la découverte de l'intelligence et de son poids (comme la découverte des moqueries à son égard), la découverte de sa propre ignorance par rapport à son ancien lui, et enfin la découverte également des limites de l'intelligence. Car être intelligent ne fait pas tout, être trop intelligent peut être un fardeau, tout comme ne pas l'être assez peu vous conduire à être exclu de la société. Bref, pour Charlie ce sera à la fois un parcours initiatique dans tout les sens, mais aussi la prise de conscience d'un soi propre qu'il lui faudra abandonner fatalement.

Vous l'aurez compris, le propos est très philosophique. Et pourtant, on ne s'en rend pas compte. Déjà par le style d'écriture. En effet, Charlie écrit d'une façon horrible au début, utilisant plus la phonétique primitive que vraiment des mots normaux (exemple : il écrit "un telligent" au lieu de "intelligent"), la ponctuation est hasardeuse et le style des mots est très simple. Puis, au fur et à mesure qu'il devient intelligent, il utilise des mots plus complexe, il utilise aussi des constructions de phrases différentes, pour avoir ensuite un style très littéraire. Le procédé est très bien construit, avec une montée graduelle (et une descente du même) qui donne un aspect particulier à la lecture, et accentue énormément le côté progressif de l'apprentissage. Le lecteur est plongé avec Charlie, s'invitant dans sa tête et dans sa manière de penser.

Ensuite, ce qui est extraordinaire, c'est la montée graduelle et non brusque. On prend le temps de s'habituer au personnage, on sent comme l'intelligence arrive et comme elle repart. C'est très bien mis en scène et le fait d'y aller doucement permet de comprendre toutes les étapes de la construction mentale de Charlie, et surtout de se rendre compte que comme il le découvre, le seul fait d'être intelligent ne suffit pas à tout. Un humain ne se réduit pas à son seul QI, mais il est beaucoup plus complexe. Charlie va apprendre à se découvrir, à rentrer au cœur de lui-même et des relations humaines. Il va devoir apprendre qui il est, et surtout qui il était. Et en même temps, nous apprenons. Comme lui, nous explorons l'homme, l'intelligence, l'idiot. C'est une construction très bien faite, qui à la fois ne noie pas le lecteur dans une masse d'informations diverses, et qui en plus sait viser juste. Les propos sont touchants et criants de vérité. C'est à la fois pénible pour Charlie et le lecteur, qui comprend ce qu'il subit. Sans compter que le fait de se rendre compte lorsque lui n'en est pas capable rajoute pas mal de cruauté au récit. Une cruauté qui est d'ailleurs vite teinté de nombreuses nuances, surtout sur la fin, lorsque l'on se rend compte que l'on juge peut-être mal certaines personnes.
La conclusion est très grise, sans blanc ni noir net. On ne sait trop que penser, et finalement elle convient à merveille au récit, concluant dans le style déjà suivi, et dans le même ton. En lisant, je pensais à cette fameuse conception du temps comme une roue. L'auteur à vraiment fait quelque chose de très habile, et j'ai beaucoup aimé le lire.


En tout cas, j'ai été conquis par ce récit qui sait mêler habillement la science-fiction à une analyse très fine de l'intelligence et de l'humain. Le mélange est fait dans les proportions parfaite, donnant un roman dans lequel on ne s'ennuie pas une seconde sans pour autant que l'on perde en réflexion. Tout est dosé finement, les détails sont très soignés, et la lecture est juste parfaite dans l'ensemble, sans aucun temps mort. Le roman se dévore en un rien de temps et laisse une drôle d'impression, provoquant plein de questions, ce qui est vraiment une excellente chose. Je dois dire que je ne m'attendais pas à une réflexion aussi poussée et que la surprise fut assez grande. Encore un roman qui démontre -si besoin est- à quel point la science-fiction est utile dans la réflexion, comme elle peut servir de point de départ pour plein de questions et de théories sur l'homme et la vie en générale. Je recommande chaudement la lecture de ce livre qui est vraiment un ouvrage de référence. Et vive les challenges permettant de lire des livres pareil.

(Chronique n°52)


Sixième participation. Je progresse vite, et bientôt
deux autres suivront (cf. colonne de droite)

jeudi 13 juin 2013

Annonce n° 6 : Une BD qu'elle est bien à lire

Annonce de la roulotte





Petite annonce à tout le monde ! Je vais essayer de faire un peu de pub pour un auteur que j'aime beaucoup et dont je vous recommande fortement la lecture du blog. C'est celui de A cup of Tim, par ... Tim !

On clique et magie ! Le blog apparait !

Si je vous conseille d'y aller, c'est qu'outre toutes les archives très sympathiques à lire (vive les vieux blogs, on trouve toujours à lire !) il a publié récemment deux histoires en 12 épisodes chacune, avec des vrais bouts à lui dedans. Je vous les laisse découvrir en cliquant juste ici, et vous avez les douze épisodes de la primaire, et les douze du collège (que j'adore vraiment).
En fait si je vous met ces liens, c'est pour une bonne raison. Le monde de la BD est tyrannique, gouverné par des méchants et des commerciaux. Du coup, les éditions de BD sont assez difficile, d'autant plus lorsque cela passe par des blogs, si on excepte certaines personnes (Boulet par exemple). En clair, plus la page sera visité, plus les gens apprécieront et commenterons, plus il y aura de possibilité d'être un jour publié sur vrai papier.

Donc, pour que nous puissions tous avoir un beau livre chez nous plutôt que de lire un écran qui nous pète les yeux avec une connexion qui saute tout le temps, faites un petit geste ! Vous pouvez la lire sans souci, bande de veinards, puisque tout les épisodes sont sorties (moi j'ai attendu la sortie de chacun individuellement, et je peux vous dire que quand on aime beaucoup, c'est long). En plus Tim est vraiment sympa, alors allez y jeter un coup d'oeil ! Et si vous avez aimé, et bien parlez en autour de vous ! Un petit mot, un petit lien envoyé, et encore d'autres personnes vont augmenter les chances. Donc allez le lire, c'est gratuit. Et c'est très bien. De nos jours c'est toujours bon à prendre, non ?
Merci à ceux qui prendront la peine d'aller voir, que vous aimiez ou non (chacun ses gouts, je ne juge pas), mais en tout cas c'est un petit geste et il est tellement beau. Et je vous dit à bientôt pour la suite des chroniques de la roulotte, en essayant de me mettre un peu plus aux critiques de BD (j'ai du mal en ce moment).

mardi 11 juin 2013

Dracula (Bram Stoker)


Ce genre de livre est assez dur à lire pour plusieurs raisons. Tout d'abord, c'est un livre culte que la plupart des gens connaissent même s'ils ne l'ont pas vraiment lu. Tout au moins connaissent-ils Dracula et tout ce qui concerne le personnage, notamment sa nature. Ensuite, c'est un livre qui fut repris à toute les sauces (télé, cinéma, jeux vidéos, BD, livres pour enfants, réécriture du livre ....), et dont je connaissais déjà la trame avant de le lire, ainsi que la façon dont c'était écrit. La seule chose qui me manquait, c'était la lecture. Et pour rentrer dans le cadre des challenges, pour aussi parfaire ma culture générale, pour lire enfin ce chef-d’œuvre tant connu, pour lire un livre que Stephen King considère comme excellent, je me devais de l'aborder enfin par moi même et plonger en Transylvanie. Et c'est ce que j'ai fait.
Petite précision : je vais faire de nombreux comparatifs avec le film de Coppola, une pure merveille soit-dit en passant, afin d'être un peu plus claire. J'espère que vous me pardonnerez ce comparatif entre deux arts très différents.


Résumé en trois mots : Vampire, Londres et Transylvanie

Je ne pense pas qu'il faille présenter le personnage de Dracula, en tout cas je ne vous en ferais pas l'offense, mais je pense qu'il faut tout de même présenter l'histoire originelle, qui est souvent assez méconnue du fait de tout les dérivées et les adaptations que le roman à connu, preuve s'il en est de son succès considérable et retentissant. Le mythe du vampire est plus que fondé dans ce livre, avec des bases qui vont progressivement se modifier, d'autres rester (même dans Twilight on trouve des traces du Dracula originel).

Pour l'histoire de Dracula (petit rappel : en italique, je parle du livre, en droit du personnage), c'est presque celle du film de Francis Ford Coppola (1992), un pur chef-d’œuvre (je crois l'avoir déjà dit, non ?). Le scénario va se dérouler autour de plusieurs journaux intimes, de coupures d'articles, de télégrammes et de correspondances, le tout mélangé et qui permet au lecteur de se faire la trame de l'histoire, depuis le début jusqu'au bout. Les seuls narrateurs sont internes. L'idée est franchement très bien, mais je trouve que Stoker n'est pas allé jusqu'au bout de celle-ci, puisque tout les personnages présentent le même point de vue dans l'ensemble. Mais je reviendrai là-dessus tout à l'heure.

Alors je dois bien dire que le récit semblait alléchant lorsque je l'ai commencé, et la première partie tient beaucoup de ses promesses, avec une ambiance pesante, une sensation malsaine, des poursuites etc ... Je dois dire cependant que le fait de tenir le récit comme un journal intime fait perdre un peu de spontanéité aux scènes, avec l'utilisation massive des temps du passé. Mais le récit est vraiment très bon, presque noir, et on se plonge dedans avec délice.
Et voici la partie 2, dans laquelle nous suivons Mina et Lucy, chacune avec ses problèmes. Et là, les ennuies commencent. Pour faire claire, cette partie est longue. Trèèès longue. Il ne se passe pas grand chose, et les intrigues sont pesantes. Les ficelles sont déjà courue pour le lecteur et les personnages prennent un temps fou pour tout comprendre (ce que je ne leur reproche pas, mais le récit s'allonge du coup). Surtout en contraste avec la première partie du récit beaucoup plus rythmé, cette partie est vraiment longue à lire. La troisième partie enchaine dans ce rythme, et se traine pour notre plus grand déplaisir.
Enfin la quatrième partie va voir la chasse à Dracula, d'abord sur Londres puis lors d'une course-poursuite en Transylvanie, qui verra -enfin !- le dénouement que l'on attendait. Cette partie renoue avec la première, un rythme très bon, du suspense et une excellente course-poursuite finale qui ponctue le tout. Je dois dire que ce fut plaisant de retrouver l'ambiance du fantastique que nous avons perdu durant près de deux parties au milieu.


Maintenant que nous avons le résumé, la critique ! Attention, ça va saigner (oui, je l'avais en tête depuis un moment et je rêvais de la faire. Ça va, il y a pire comme jeu de mot).
Alors si je n'ai rien à redire sur l'idée de la forme employé (des journaux intimes et des articles de presses), je dois dire que j'ai été déçu du traitement très sobre de l'ensemble. Rien de très efficace, alors qu'il y aurait eu matière à faire beaucoup mieux, notamment en donnant un point de vue différent selon les rédacteurs, alors que là c'est vraiment décevant, tout le monde écrivant peu ou prou la même chose. Le point de vue des femmes est d'ailleurs très peu différent de celui des hommes.

En parlant des femmes et des hommes, je dois dire que le récit sent pleinement les vieux stéréotypes du XIXème siècle. Les personnages sont très clichés, tout les hommes se ressemblent ou presque (on inverse les noms et les têtes et le reste est identique) et les femmes sont énervantes et clichés ! (je m'énervais presque contre Mina dès qu'elle parlait). En comparant avec le film, il n'y a pas photo, le film a crée des personnages charismatiques alors que le livre les fait paraitre plat ! Jonathan qui avait de l'épaisseur dans la première partie à perdu tout son charme par la suite. C'est vraiment dommage.

Ensuite, par rapport au film, il manque quelque chose dans le livre. C'est l'histoire d'amour entre Dracula et Mina (dans le livre, c'est complètement inexistant !). Et bien je dois dire qu'elle manque sacrément. Il y a quelque chose qui rend le personnage de Mina fade et qui fait ressembler Dracula à un monstre d'opérette. Le problème, c'est qu'avec en plus les clichés des personnages, ce manque se fait cruellement ressentir.
D'ailleurs, par rapport au film aussi, il manque quelqu'un dans le livre. Et c'est d'autant plus dommage que le nom est tout de même sur la couverture. Eh oui ! Dracula est le grand absent du livre. Pour ainsi dire, on ne le voit pratiquement plus après le premier passage, sauf quelques apparitions, et même à la fin il est très peu présent. D'autant plus, il est charismatique ! Moins que dans le film (largement moins), mais il a un charisme indéniable, avec son aura malfaisante qui émane tout le temps de lui. Cela dit, son absence fait ressortir le côté très fantasmagorique du personnage, comme si les héros l'inventaient et devenaient fou (ce qui n'est d'ailleurs pas exclu). Et c'est vraiment dommage, car sa présence donne plus de corps au récit, tandis que son absence se fait ressentir (beaucoup dans la deuxième partie, et un peu dans la troisième).
Enfin, par rapport au film on perd beaucoup au niveau métaphore sexuelle (je pense qu'elle ne vous aura pas échappé si vous avez vu celui de Coppola). Et là encore, je trouve qu'on sent le caractère chaste et prude du XIXème, très enclin à ne pas choquer les personnes.


Cela dit, j'ai bien aimé le lire, même si j'ai eu un peu de mal à le finir vite, et que j'avoue m'être ennuyé dans le milieu du récit, qui piétine franchement je trouve. Le personnage de Van Helsing redonne du corps, avec son caractère particulier et ses phrases qui maintiennent un suspens durant un bon quart du livre. C'est toujours un bon plus (cela dit, il est encore meilleur dans le film, beaucoup plus angoissant par son côté nonchalant).
Il faut ajouter que Renfield est aussi une petite trouvaille sympathique, bien qu'il n'ai pas le moindre lien avec le reste de l'histoire et qu'il n'y a aucun moyen de savoir comment il connu Dracula. C'est une lacune qui est étrange, mais en lisant les notes de traduction on se rend compte que Bram Stoker a fait plusieurs erreurs dans l'écriture du récit (surtout qu'elles sont très grosses).
Cependant, ces personnages sont noyés dans les bons sentiments et les excellences dont font preuves les autres personnages, sans le moindre travers moral et d'une gentillesse légendaire. En fait, en lisant je repensait aux livres de la Comtesse de Ségur où tout est rose et mignon, gentillet et croyant. Le contraste avec Dracula est violent du coup, mais les deux paraissent fade. Le manichéen primaire, c'est vraiment quelque chose qui passe mal quand on ne le fait pas bien.


En fin de compte, le roman est peut-être culte, mais je l'ai trouvé fade, avec un relent de poussière par dessus. On sent que le roman est vieux, et sa morale s'en fait grandement sentir, avec une histoire qui piétine aussi sur plus d'un passage et des personnages au charisme douteux, avec des petits détails qui manquent dans l'ensemble du récit. Je trouve que le roman souffre de la comparaison qu'on peut faire avec les dérivés, et le film de Coppola est à mon avis le meilleur exemple qu'on puisse trouver, et dans le genre roman de vampire, je trouvais Salem de Stephen King mieux réussi.
En attendant de trouver à nouveau le roman de vampire qui me fera rêver, je dois dire que celui-ci contient tout de mêmes quelques bonnes idées et qu'en tant que roman culte et fondateur des vampires, créateur du vampire le plus célèbre et sans doute le plus intéressant, Bram Stoker à tout de même le droit aux hommages, et la lecture de ce classique est tout de même intéressante dans ce sens (et pour comprendre tout le mal qu'on fait certains auteurs récents au mythe du vampire).

(Chronique n°51)

Quatrième participation, on progresse
Et cinquième participation ! La moitié de fait

 

jeudi 6 juin 2013

Le fléau (Stephen King)


Encore un Stephen King, mais là nous arrivons plus dans ces fameux romans d'horreur qui ont assis sa réputation, mais qui ne sont pas forcément les meilleurs de sa production. Je garde en réserve Ça pour l'instant, et j'attaque des pavés qui tiennent en haleine pendant un petit moment (764 pages le premier, 790 pages le deuxième). Le fléau c'est sans doute son plus gros avant la fameuse série de La tour sombre qui lui contient de quoi tenir pendant la semaine. Quand il fait des séries, il y a de quoi lire, et d'ailleurs il faudrait que je me procure Dôme qui m'a l'air très sympa aussi (et je pense que je vais essayer de le prendre rapidement). En attendant, voici un des bons pavés de Stephen King qui explore les côtés noirs et fantastique de l'âme humaine, la dualité des gens, voici Le Fléau de Stephen King !


Résumé en trois mots : Apocalypse, Survivants et Organisation

Donc encore un petit Stephen King ! Alors de quoi parle donc ce roman ? Et bien tout simplement, d'un fléau. Ah oui, précision rapide : ce livre est disponible en deux ou trois volumes (tout comme Ça du même auteur) mais je ne parle ici que de l'édition 2 volumes, qui est celle de la collection Livre de poche. C'est un ouvrage conséquent (1554 pages en tout) qui va vous tenir en haleine sur une bonne durée ! Ah oui, dernière petite précision : l'édition Livre de poche contient de temps à autres des illustrations en noir et blanc, chose assez rare pour être signalée. Elles ne sont pas extraordinaire dans l'ensemble, mais elles complètent bien l'ensemble et permettent de s’imprégner de l'atmosphère noire qui transparait beaucoup dans le roman. C'est assez curieux que l'édition ai choisie d'en rajouter (ou de les laisser). Mais c'est une très bonne idée, dont on peut les féliciter.
Déjà, l'histoire est simple mais est curieusement en avance sur beaucoup de contemporain : un virus décime 99.4 % de la planète. C'est pas du virus de mauviette ça ! Et attention, pas d'apocalypse zombie, pas de trucs de ce genre. Non, juste une belle mort pour tout le monde, des cadavres dans les rues, des survivants hagards et qui ne survivent pas tous très longtemps. Stephen King sait encore une fois jouer et toucher juste. Un vrai manipulateur d'esprit.
En fait la première partie du premier livre va se concentrer sur la propagation de la maladie et présenter un peu tout les personnages qui interviendront ensuite. Nous aurons aussi le droit à des morts qui n'interviendront plus ensuite (notamment un gamin qui tombe dans un puits). Et évidemment, la présentation du grand méchant à la Stephen King, le mal absolue, l'homme en noir (qui est un des plus charismatique du roman d'ailleurs) : Randall Flagg. Un personnage qui revient dans Les yeux du dragon ou encore dans La tour sombre, et qui est juste parfait dans le rôle de l'homme en noir, méchant jusqu'au bout des ongles et aux intentions douteuses. Ensuite vient la personnification du bien, de l'envoyé de Dieu, bien que comme toujours avec Stephen King se soit douteux (Dieu est toujours un peu salaud dans ses romans et très cruel) avec le personnage de Mère Abigael, une vieille noire de 108 ans, la doyenne de l'humanité désormais. Ces deux personnages vont cristalliser les survivants en les appelants dans leurs rêves. Ils vont désormais s'unir en deux camps bien opposés, chacun avec ses intentions, et chacun avec ses moyens.

Le spitch semble classique d'une histoire de fin du monde, mais je dois bien dire que les ficelles sont très peu courantes, même si le principe de la dualité des deux camps est posé de façon très manichéenne, les personnes dans ces camps sont très diversifiés. Personne n'est simple, les gens ont tous des facettes plus complexes qu'on ne peut le penser, et Stephen King le retranscrit bien. Les personnages du camp "gentil" sont plus simples on dirait, mais ils ont également des mauvais côtés qui ne demandent qu'a ressortir. SK se fera un plaisir de le faire. En plus de ça, la galerie de personnages est très variée, et les portraits sont bien construits, sans trop de clichés. En plus nous suivrons leur évolution sur une période très longue, ce qui est d'autant mieux pour bien comprendre.

Le fil rouge du livre varie selon les périodes. D'abord en présentant tout les personnages, puis dans la quête de chacun jusqu’à trouver le lieu qui sert de rassemblement à celui qu'il cherche, puis ensuite le développement des deux communautés qui renaissent progressivement, avec tout les problèmes que cela peut poser. Et bien évidemment le fait que chacun connait la présence de l'autre camp et sait très bien qu'il n'est pas d'accord avec lui. D'où des tensions qui naissent entre les camps et dans les camps. Le deuxième volume va se concentrer justement là-dessus, avec moins d'horreur que dans le premier tome, qui contient plus d'un passage qui vont vous prendre au tripes. Dans le style d'écriture classique de SK, vous ne décrocherez pas d'une page jusqu'à la fin. Tout le génie de SK, c'est d'arriver à vous maintenir jusqu'au bout en état d'haleine sans que vous n'ayez de répétition. Le fait que la trame change plusieurs fois incite vraiment à aller jusqu'au bout du roman, et le dénouement (comme souvent chez SK) ne laissera pas indemne les personnages, et surtout vous invitera à repenser la société et ses fondements. Sans que le propos ne soit vraiment développé à fond (comme un ouvrage de philosophie), SK nous propose quand même de revoir la société à la base et de comprendre la nature de l'homme. Ce n'est pas la philosophie la plus élaborée, mais elle est là et apporte un peu de fond. C'est déjà ça.


A mon avis, le fléau est un livre prenant, un bon livre. Il se dévore très vite malgré la taille, et on a le droit à une belle galerie de personnages ainsi qu'à une intrigue qui tient la route en variant plusieurs fois dans l'ensemble des tomes. Le tout agrémenté de plusieurs passages d'horreur et prenant, comme sait si bien le faire Stephen King.
Bien évidemment, nous auront le droit également à une réflexion assez manichéenne dans l'ensemble, mais les personnages sont bien traités. Le livre se relit très bien et est toujours aussi prenant à la .... vingtième relecture, signe évident de réussite. Je pense vraiment que c'est un bon livre et qu'il vaut le coup d'être lu, même si on est pas dans le meilleur de ce qu'a fait Stephen King.

(Chronique n°50)