vendredi 27 mars 2015

Coulez mes larmes, dit le policier (Philip K. Dick)

Je viens de finir ce livre que j'ai déniché en occasion et que je me suis attaché à lire pour me changer les idées de mauvaises nouvelles qui venaient de tomber. C'était l'avant-dernier livre de l'auteur en ma possession, et j'avais entendu parler de lui de différentes façons, chacune s'accordant sur un côté très important de cette oeuvre au sein de la bibliographie de Philip K. Dick. Cela a bien sur titillé ma curiosité, et je ne me suis pas fait prier pour le lire, ce qui fut fait rapidement avec ces larges périodes horaires dont je dispose actuellement.


Résumé en trois mots : Réalité, Drogue et Célébrité

Un drôle de livre, très dérangeant et assez atypique. Dans l'univers de Philip K. Dick, la réalité est toujours autre, trouble et distordue, mais ici, l'histoire est clair et limpide au final. Tout est expliqué et tout est compréhensible. Pour un lecteur habitué à l'auteur, c'est curieux. Il contient même un postface qui donne la trame que poursuivent les personnages après le roman. J'ai cependant été bien plus surpris par la tournure que prenait ce livre.

L'histoire est celle d'un présentateur télé qui se réveille un jour en étant inconnu du monde entier. Personne ne sait qui il est, nul ne se souvient de lui et même la police ne dispose plus d'un seul fichier le concernant. Alors que le monde est un gigantesque état policier bureaucratique. Donc dangereux pour quiconque se retrouve démuni d'identité du jour au lendemain.
Ce roman est très curieux, en deux parties qui se joignent vers le milieu du livre, mais c'est également un roman où le héros n'est pas clairement identifié. Alors que l'appareil bureaucratique et la pression de la police désigne l'Etat et l'autorité comme "méchant" de l'histoire, je dois avouer que le héros est loin d'être tout blanc et me semble souvent être un fieffé connard. De même, cette police omniprésente dans l'esprit est bien plus relâché et normale qu'on pourrait le penser. Pas de toute puissance qui intervient n'importe comment, seulement des hommes normaux qui font leurs boulots et s'y tiennent.

Ce roman est curieux, enchainement de tableaux et de situations variées, parfois superbes, notamment une scène finale dans une station-service, mais également très sombres, au personnages torturés, psychotiques et parfois aux frontières de la folie. Certains sont totalement normaux et sont rapidement submergés par ce qui leur arrive, mais les autres sont pris dans des filets qui les entrainent toujours plus loin.
Je parle des personnages car c'est eux qui sont centraux, avec leurs interrogations, leurs motivations, leurs vision du monde. Tout est autour d'eux et de leurs rapports, les rapports humains. Entre des humains génétiquement supérieur, des humains déshumanisés. Tout est dérangeant dans ce livre, et la frontière brouillé de la réalité est une fois de plus un élément central.
Mais cette fois-ci, moins d'interrogation sur la "vraie" réalité. Plutôt une conception de l'homme quelque soit la réalité. Qu'importe ce qui est vrai, comment agissons-nous en humain dedans ?


Ce roman comporte bon nombre d'interrogation, et je ne pourrais en tirer l'ensemble. Il me faudra le relire, essayer d'en extraire tout le contenu, et la tâche ne sera pas facile. Rien n'est limpide, rien n'est offert gratuitement. Il faut fouiller pour extraire chaque idée. Mais quelles idées ... C'est confus encore dans ma tête, et j'aime ça.

Un roman qui tranche assez avec ce que j'ai déjà lu de Philip K. Dick. Moins de spontanéité, moins de folie, plus d'introspection. C'est très rentré, les personnages sont au centre d'une oeuvre qui pose de nombreuses questions et dont les réponses ne sont pas clair. C'est a la fois très intense à lire, et curieusement dérangeant. Quelque chose s'en dégage, quelque chose que j'ai du mal à cerner mais qui me fait encore m'interroger sur cette oeuvre décalée. Si je vous la conseille, je peux aussi vous dire que c'est quelque chose de neuf. A lire, pour essayer de comprendre.

(Chronique n°251)

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